Froid glacial chute sur la ville des sables La nuit, porteuse des songes de tout être vivant est ici une reine implacable. De son sceptre des vents, elle fouette une population fatiguée, qui peu à peu se regroupe autour d'un nouvel édifice ;
volonté est plus forte que les douleurs de la ténébreuse reine ...
GALA EN GRANDES POMPES
Quelques heures auparavant, un ruban de soie, douce texture et cher tissu embrassait de sa délicate attention les piliers d'un neuf bâtiment. Étrange construction que voilà, se rajoutant grossièrement à un paysage fait de structures plus pauvres et bien plus avancées en âge. Immense bâtiment, gigantesque projet d'un homme au bord du gouffre financier. Absurde et dangereux placement dans une ville déjà ébranlée par ses propres sables mouvants ;
ils bougent, lentement mais sûrement ils attendent leur heure pour fouler de leurs grains ce sol supposé meuble, renverser d'un coup de pied, d'un souffle l'égoïsme de quelques uns. Maintenant, face au tissu raffiné tremble des mains armées d'un trop grand ciseau. Heure du jardinage, sans nul doute ou bien pensez-vous qu'il s'agisse du futur tueur qui hantera les rues de cette ville des sables ? Les deux propositions sont malheureusement vraies. Car la personne qui tient cet objet coupant n'est autre que l'exécutif de Kalel ;
il a froid, si froid ...Ils ont tous froid. Tous les invités tremblent tels des séquoias secoués par une tempête d'hiver. Emmitouflés sous leurs vêtements de cérémonie, la pléiade fortunée attend que cette nuisance cérémonieuse se termine. Ce peuple bien fardé veut rentré et se réchauffer alors que cela cesse ! Ils s'agacent, fustigent discrètement ... à l'exception d'une personne ;
la porte luisante du carrosse vrombissant s'ouvre et laisse son invitée sortir. Flashs et appels à l'attention de la nouvelle venue éclatent pour agresser un oeil qui encore il y a quelques instants était loin de toute agitation. Imperturbable, celle que tous veulent au bout de leur objectif, celle qui maintenant fait retourner les premiers frileux de l'assemblée, la femme sort en s'appuyant de sa main sur la porte de la voiture.
Ses longs doigts de porcelaine nus de tout bijoux sont déjà pris en photo alors que son visage n'est pas encore apparu ;
cette lumière est dangereuse la demoiselle en veut à son agent, parce que jamais elle n'a cautionné que ce bâtiment soit érigé. Mais il avait fallu choisir entre risquer de se voir agresser par de malvenus mercenaires à la solde du pantin de dirigeant ou venir ici et subir cette décadence;
apparaît enfin le visage de porcelaine Chignon de cheveux blancs, perle de lait que l'on s'arracherait si le joyaux existait. Visage fin et longs cils de jais cachant légèrement par demi fermeture de paupières des yeux de ciel marin. Corps galbé, aux formes généreuses sans être exagérées. Toute cette sculpture féminine apparaît dans
sa robe bleu de nuit aux cascade d'étoiles faites de diamants.
Le temps s'arrête Tous la fixent et s'offusquent de cette tenue bien trop légère, en ce climat peu propice à leurs yeux. Pas dans le thème. Mais d'aucun ne s'accorde à critiquer plus car il n'y a rien à critiquer.
Fantasmagorie baignée d'une cascade galactique. Reine des neiges parée de la robe des cieux. Élise Duval, l'écrivaine aux charmes de mille et une envies humaines vient d'apparaître. De ses escarpins coordonnés au tissu de nuit, elle foula ce tapis que bien d'autres avant elle en cette soirée avait piétiné sans ménagement, afin de poser pour quelques malheureuses photos dans des magasines. La norsk quand à elle ne s'attarde que pour offrir quelques autographes à des fans ayant pu se faufiler jusqu'aux barrières. Mais Dan, son agent, la rattrape bientôt par le bras d'une prise ferme. Elle doit poser et être interviewé ;
tu le dois ou sinon ... sinon quoi ? ils tueraient pères et mères parce que l'on s'est refusé à eux ? Si seulement ils savaient qui est cette femme qu'ils veulent tous posséder.
Freya se sent oppressée. Freya veut se retirer sèchement de cette prise et regagner un moment sa liberté. Mais comme toujours, qu'elle ait été aède, magicienne, beauté aux multiples facettes chez les dieux comme chez les humains, on la retenait toujours entre des murs. Des murs différents qu'elle peut facilement briser certes mais malheureusement, elle ne veut blesser personne en les faisant s'effondrer ;
alors il faut accepterAccepter jusqu'à ce qu'elle puisse demander sa liberté ; tourne toi et pose, réponds aux questions avec ce sourire chaleureux qui les aide à oublier leurs douleurs. Pars à présent rejoindre riches et nouveaux riches au pied de l'escalier. Le ruban est
coupé et délivre après un long discours sur la gloire d'un musée abritant les trésors de toutes les cités. Que pensent les aventuriers, les archéologues réunis au milieu de cette populace parfumée et habillée de grossiers vêtements digne d'un bal masqué ? Quel
mot leur vient à l'esprit ? –
personne ne sait – alors il vaut mieux se taire que spéculer sur du rien.
DÉCOUVRE LES SALLES ET RENCONTRE
La poétesse monte les marches lentement, tandis que d'autres, bardés de sarouals, saris, toges et l'on ne sait quels autres apparats bien chers et chauds, se pressent sans admirer l'édifice. À mi chemin, ses reins la tournent vers le ciel nocturne et Élise admire cette vue qui heureusement, n'a pas changé malgré les âges infâmes de l'humain et du gardien à présent appelé vampire;
elle sourit alors qu'autour d'elle les gens montent en forçant le pas. Cette nuée digne d'ouvrières survivante d'une ruche ne perturbe en rien la protectrice des amours. Immobile, seul sa main droite se lève pour s'apposer contre sa poitrine. Cette vision en stupéfie plus d'un seul et dépeint un tableau bien atroce pour les gens de Kalel. On pourrait l'appeler "La modestie et les bouffons"
Artiste relèveras-tu le défi ? Puis la belle des montagnes regarde un instant ceux bloqués au bas des marches de marbre d'un air tendre et plein de compassion. Elle les aime, et ceux qui sont entrés sans poser leur regard puissant sur eux, plèbe de bas étage, elle les aime aussi. Ils sont tous humains -
malgré tout - et à son tour, elle disparaît de leur vue.
Les portes se sont refermées. Dehors, la population grandit, cachée aux yeux des grands, mais bien présente. Elle, la dame qui se départit des habits de cérémonie de cette soirée, admire seule les salles. Mais avant, Freya avait dû saluer, se présenter et échanger quelques palabres insipides avec certains. Recevoir aussi des demandes de futurs amants qui, pour toucher ce corps et ce coeur des neiges, avaient su parler justement. Leurs âmes rayonnaient à chacun de leurs mots et le coeur d'Amour battit à un rythme devenu plus rapide. Mais elle se détacha d'eux, donnant rendez-vous à l'un d'entre eux sur une petite note ;
prise et promise Les longs cheveux de jais, ce regard perçant aux yeux bleus virant vers une teinte violette, le visage digne d'un dieu grec et sa culture eurent raison d'elle. Mais elle le laissa aux bons soins d'autres badauds couverts de joyaux. Car les conversations mondaines ne l'intéressent pas, bien que le buffet se trouvant dans le hall lui ai fait de l'oeil. Non, la belle des dieux s'avance, frôle le marbre taillé des murs de ses longs doigts aux caresses inoubliables et se fond au hasard dans l'une d'entre elle.
Premiers pas Ce qu'elle découvre la stupéfait et l'offusque en même temps. Cette première salle renferme des trésors de religions, celles issues de ce que l'on appelle hindouisme. Tapisseries aux couleurs chatoyantes, où sur l'une Shiva et Ganesh se mêlent pour danser au milieu de rosaces dorées, fresques retirées de ruines, bijoux sans nul doute arrachés à des corps enfouis ...
pillages cela fait mal au coeur de la déesse, qui aussi admire avec passion les vestiges de cette civilisation. Nez levé vers le plafond, pivotant sur elle même avec ce sourire baigné des solaires lumières, Freya tend les bras et brille de sa beauté. Ses lèvres roses s'ouvrent grandement quand dans le sillage de ses pas, elle se met à buter contre une surface.
PRISE AU DÉPOURVU
Cette surface est chaude, tendue sans doute sur le coup de la surprise. Elle y reconnaît des muscles quand ses doigts glissent et se départissent de son appui involontaire. Ses grands iris bleus se lèvent vers le visage d'un air d'abord désinvolte qui rapidement s'empourpre d'embarras ;
pauvre de toi il est beau, mat, blond, avec des yeux bleus plus sombres que la couleur de sa robe. Elle sent aussi une présence qui lui est familière, comme une sorte d'aura. Encore un hôte. Encore un humain frappé de la cire du fou scientifique. Ce mal qui prit aussi Freyr entre ses griffes souillées. La norsk tremble et reconnaît ;
elle veut le dire « Skan ... » commence-t-elle à dire
Mais les mots ne viennent pas car l'hôte l'intimide et l'attire. Sa main gauche se relève et ses doigts s'étirent car ils veulent toucher cette mèche retenue par ce tissu bleu. Mais la déesse sent que quelque chose la repousse et qu'elle doit respecter un dieu qui pourtant lui inspire tant de sentiments. Elle voudrait apaiser cette colère ... -
mais elle s'y refuse - ses yeux brillent de larmes, secouant d'écumes transparentes une mer qui jusque là était calme. Soudain, le contact visuel se rompt, quand d'un coup de tête sec vers la droite faisant voler ses boucles d'étoiles dans son mouvement, Amour aux roses pommettes recule dans toute sa mélancolie et son hésitation de femme.
il est Skanda Elle abaisse ses yeux, pulpe de doigt touchant ses lèvres fines et belles pour enfin marcher et ne plus adresser un regard à cet être.
« Désolée »
C'est le seul mot qu'elle a pu lui dire avant de disparaître dans une autre salle, tandis que l'inconnu se fait aborder par un groupe de charmeuses aux exotismes de tout bords.
« Dites, ce n'était pas Élise Duval ?, demanda une rousse un qui sans nul doute a ajouté des formes à sa personne de manière chirurgicale
- Elle n'était pas en train de fricoter avec Lucas Vacyllis ?, siffla une brune aux yeux marrons peint de khôl à la façon égyptienne
- Elle cherche sans doute à faire un plan à trois avec vous ? »
Le groupe se met à rire, voir glousser. Ces puissantes se mettent à cracher dans le dos d'une femme qui est ennemie à leurs yeux, une femme qui ignore pourtant ces inepties et tape de ses talons les couloirs de pierre polie vers des directions inconnues.
RETOUR À LA CASE DÉPART
Ses pas la mènent à nouveau vers cette foule qui tient flûtes de champagne et discours censés être élaborés. Freya, belle déesse aux sentiments si forts, sent son coeur serrer dans sa poitrine et sa vue se brouiller. Son seul salut est ce serveur, penché vers elle et tendant un plateau de verres. Ce liquide doré et fin pétille de joie, il est ivresse et réconfort quand les tensions bloquent le corps et ferment les esprits fragilisés.
« Un verre, mademoiselle ?
»
Son sourire réapparaît alors qu'elle n'était qu'absence il y a encore quelques instants et de ses longs doigts de porcelaine la dame attrape le verre.
FaçadeRadieuse, le serveur perd son expression d'inquiétude, occasionné par cette détresse qu'il a senti chez cette femme. Perplexe en réalité et pleine de compassion pour ces deux êtres liés de force, Élise fait comme pour Ludwig et Freyr : elle fuit pour ne pas les blesser.
« On annonce les groupes pour la visite guidée, veuillez vous approcher »
Un des fondateurs de l'édifice sûrement, invite les gens à se regrouper pour les répartir. La blanche des neiges éternelles s'avance. Mais bien rapidement, elle est noyée dans cette foule qui se resserre en un étau brûlant et étouffant autour d'elle. Elle essaie alors de se concentrer sur ce qui est dit, visage levé vers le plafond, pour respirer. Soudain, son coeur se remet à se serrer et battre furieusement. La raison est simple, il n'est pas loin ... cet homme aux cheveux blonds, au teint hâlé, possédé par un dieu de guerre et de force ...
ET DEHORS, LA POPULATION GRONDE